Serge Joncour
Flammarion – août 2020
Quand la ruralité est absorbée par la modernité. Alexandre a quasiment la quarantaine, en 1999. Il prépare dans sa ferme des explosifs artisanaux. Au passage de l’an 2000, il veut tout faire péter.
Petite famille de six personnes, rurale, fermière, en 1976, vivant aux Bertranges, collines verdoyantes dans le Lot-et-Garonne à cent vingt kilomètres de Toulouse à travers champs, à réaliser en GS ou en 4L. Petites vies sur des terres généreuses, des vaches mais pas trop, un éloignement certain de la ferveur des grandes villes. Mais voilà que ces grandes villes se rapprochent des campagnes, que les campagnes et surtout les jeunes campagnards sont irrémédiablement attirés par la ville. Le monde évolue, des voix s’élèvent contre ce monde : leur voisin agriculteur Crayssac, ancien du Larzac, qui se bat contre les poteaux en bois plein d’ammoniaque amenant les lignes téléphoniques. Caroline, une des trois sœurs, et ses amis plus radicaux qui se battent contre la construction d’une centrale nucléaire. Alexandre, quinze ans en 1976, dix-neuf en 1980, plus encore quelques années après, est spectateur de ce monde de luttes, ce monde qui bouge autant que la modernité tout en la combattant, en sachant pertinemment qu’il est voué à prendre la suite de la ferme, comme son grand-père et son père avant lui. Il rencontre une amie de Caroline, Constanze, une belle est-allemande constamment en déplacement tandis que lui ne peut pas bouger. Plus qu’une rencontre, elle devient le fil rouge de sa vie. Cette vie qui progresse, saute des années pour s’attarder sur des périodes, dans un contexte de luttes locales, de changements nationaux et de bouleversements internationaux, mais ces derniers paraissent bien loin des vaches des Bertranges, quoique le vent d’ouest pourrait les rapprocher.
Dans « Nature Humaine », Serge Joncour traduit d’une belle plume fluide l’isolement des campagnes, la fuite des nouvelles générations et l’arrivée du moderne, du plus pratique, dans les territoires ruraux. Pour le meilleur et pour le pire, le monde évolue : sans doute que quelques vies rebelles n’y changeront rien.
Nathan